La joie au coeur de chaque instant - Article
Article pour la revue Rêve de femmes
N° de décembre 2017
La joie au coeur de chaque instant
La joie est multiformes, et en comprendre toutes les facettes renforce notre capacité à la cultiver dans notre quotidien, même le plus banal. Joie d’être vivant, spontanéité joyeuse de l’enfant, joie dans l’élan de l’action, la joie explose dès que l’on consent à se laisser toucher profondément par la vie et que l’on s’autorise totalement à être soi, le vivant sous toutes ses formes.
La joie de l’enfant et la spontanéité
La spontanéité du petit enfant est la source même de sa joie. Totalement donné à la Vie qui émerge en lui à chaque instant, chacun de ses mouvements en est l’expression directe et sans filtres. Cette spontanéité est rendue possible parce que l’enfant n’a aucune identité à défendre : il n’est pas une personne qui vit sa vie, il n’y a pas encore en lui cette mentalisation de sa propre présence au monde. Il EST la Vie. Il EST. Être est son état naturel.
L’élan de vie qui émerge et se déploie à travers l’enfant est en réalité une immense bouffée de joie. Car la Vie est intensément curieuse de s’expérimenter à chaque instant à travers toutes les formes qui émergent d’elle et en elle. Elle ne juge pas, ne choisit pas, ne trie pas les expériences, elle est pure élan et pure joie. Et la Vie, c’est nous-même, c’est notre nature profonde.
Mais peu à peu, cette spontanéité du tout petit va se cogner contre les limites de son entourage. Il va réaliser que certains de ses faits et gestes conditionnent la joie et l’amour de ses parents. Pour maintenir ce lien indispensable à sa survie, l’enfant va peu à peu construire puis s’identifier à une structure mentale de protection qui a le mérite de préserver son équilibre physique et psychique, mais qui va restreindre sa propre liberté d’être… et sa joie. En tournant notre regard vers notre plus profonde intériorité, nous pouvons à nouveau redevenir nous-même, ce vivant libre et joyeux.
Consentir à la banalité et toucher le monde
Vers l'âge de quinze ans, la lecture d'un conte de sagesse indienne fut déterminante. Il mettait en scène un brahmane étudiant des textes spirituels, et son épouse qui, elle, s'occupait de la maison et des enfants. Dans chacun de ses gestes, en faisant la cuisine, en balayant le sol, en berçant son enfant, elle mettait une attention et une présence douce et attentive. A la fin de l’histoire, elle reconnaissait sa véritable nature immuable : la Vie. J'ai senti que la confrontation au quotidien pouvait révéler quelque chose de fondamental.
J’appelle cette pratique le "yoga des carottes" car je l’ai pratiqué d’abord dans le fait de les éplucher, puis dans chaque geste banal du quotidien. Je suis juste présente à mon vécu, ma respiration, mes pensées qui passent, mon corps qui agit et se déplace. Cette attention, cette écoute investit peu à peu bien plus que notre perception mentale de ce que nous faisons : elle est dirigée vers notre être global. Le filtre de la personnalité va doucement s’abaisser pour nous permettre de vivre la vie directement, sans filtre. Très vite, cette pratique si simple et accessible m’a apporté une joie douce au quotidien, une grande sensorialité, puis une qualité de présence qui ne me quitte plus.
La joie de l’action et l’obéissance à l’élan de vie
Une autre source de joie est l’élan de vie qui émerge et désire s’expérimenter dans la matière. Quand nous libérons cet élan, nous libérons la spontanéité et la joie. Cet élan provient directement de la source de toute vie, c’est l’expression de notre essence même. Il a le plus beau rôle dans notre fonctionnement quotidien : proposer l’action la plus juste dans l’instant. Nous pouvons le ressentir à travers un élan, un mouvement spontané, un désir vers une activité. Cette spontanéité est comme une bulle de joie qui émerge : elle ne peut exploser que si nous consentons à lui obéir. Suivre ses élans, sans but ni stratégie, nous ramène pas à pas vers notre liberté intrinsèque et la source même du vivant.
Au quotidien, je suis attentive à écouter où l’élan me mène. J’observe que si je commence par les actions qui me plaisent le moins dans l’espoir de faire ce qui me plait ensuite, je n’ai pas le temps de faire les secondes, les premières remplissants ma journée. Par contre, si j’écoute l’élan, même déconcertant au niveau des priorités habituelles, non seulement je suis comblée, mais en plus les actions moins plaisantes sont faites ensuite en peu de temps et avec légèreté. J’ai aussi fait des choix radicaux de vie. La joie demande parfois du courage.
Retrouver la joie d’être simplement soi
Mais pour retrouver totalement la joie de l’enfant, l’invitation ici est de s’autoriser profondément à être soi. Etre soi, c’est être ce qu’on est capable d’être à un instant donné. C’est le simple vécu direct et sans restriction de ce que nous sommes à chaque instant, avec notre personnalité, notre corps, nos limites, émotions, sensations, aptitudes, croyances, erreurs, jugements, refus et réussites.
C’est donc un élan et un geste d’amour immense pour nous-même : c’est une autorisation sans précédent à être pleinement à chaque seconde ce que la vie fait de nous, notre vécu de l’instant et ce que la vie nous propose. Peu à peu nous pouvons ouvrir notre coeur à ce qui se présente en nous et à nous en contactant notre intériorité et en nous laissant toucher totalement par nous-même. Tout en nous mérite notre amour, et nous sommes les seuls à pouvoir nous le donner. C’est dans ce contact profond avec soi qu’émerge l’amour inconditionnel de ce que nous sommes. Alors, la joie du petit enfant, enfin aimé profondément, se réveille et explose en myriades d’étoiles.
Notre être entier est ainsi de plus en plus comblé, non pas parce que nous obtenons ce que nous voulons, mais parce que nous consentons à vivre l’instant à partir de notre essence. Et dans ce mystère vivant que nous sommes, nous consentons totalement à ce que la joie émerge… ou pas. Car cet accord profond est une autorisation à être tout.
N° de décembre 2017
La joie au coeur de chaque instant
La joie est multiformes, et en comprendre toutes les facettes renforce notre capacité à la cultiver dans notre quotidien, même le plus banal. Joie d’être vivant, spontanéité joyeuse de l’enfant, joie dans l’élan de l’action, la joie explose dès que l’on consent à se laisser toucher profondément par la vie et que l’on s’autorise totalement à être soi, le vivant sous toutes ses formes.
La joie de l’enfant et la spontanéité
La spontanéité du petit enfant est la source même de sa joie. Totalement donné à la Vie qui émerge en lui à chaque instant, chacun de ses mouvements en est l’expression directe et sans filtres. Cette spontanéité est rendue possible parce que l’enfant n’a aucune identité à défendre : il n’est pas une personne qui vit sa vie, il n’y a pas encore en lui cette mentalisation de sa propre présence au monde. Il EST la Vie. Il EST. Être est son état naturel.
L’élan de vie qui émerge et se déploie à travers l’enfant est en réalité une immense bouffée de joie. Car la Vie est intensément curieuse de s’expérimenter à chaque instant à travers toutes les formes qui émergent d’elle et en elle. Elle ne juge pas, ne choisit pas, ne trie pas les expériences, elle est pure élan et pure joie. Et la Vie, c’est nous-même, c’est notre nature profonde.
Mais peu à peu, cette spontanéité du tout petit va se cogner contre les limites de son entourage. Il va réaliser que certains de ses faits et gestes conditionnent la joie et l’amour de ses parents. Pour maintenir ce lien indispensable à sa survie, l’enfant va peu à peu construire puis s’identifier à une structure mentale de protection qui a le mérite de préserver son équilibre physique et psychique, mais qui va restreindre sa propre liberté d’être… et sa joie. En tournant notre regard vers notre plus profonde intériorité, nous pouvons à nouveau redevenir nous-même, ce vivant libre et joyeux.
Consentir à la banalité et toucher le monde
Vers l'âge de quinze ans, la lecture d'un conte de sagesse indienne fut déterminante. Il mettait en scène un brahmane étudiant des textes spirituels, et son épouse qui, elle, s'occupait de la maison et des enfants. Dans chacun de ses gestes, en faisant la cuisine, en balayant le sol, en berçant son enfant, elle mettait une attention et une présence douce et attentive. A la fin de l’histoire, elle reconnaissait sa véritable nature immuable : la Vie. J'ai senti que la confrontation au quotidien pouvait révéler quelque chose de fondamental.
J’appelle cette pratique le "yoga des carottes" car je l’ai pratiqué d’abord dans le fait de les éplucher, puis dans chaque geste banal du quotidien. Je suis juste présente à mon vécu, ma respiration, mes pensées qui passent, mon corps qui agit et se déplace. Cette attention, cette écoute investit peu à peu bien plus que notre perception mentale de ce que nous faisons : elle est dirigée vers notre être global. Le filtre de la personnalité va doucement s’abaisser pour nous permettre de vivre la vie directement, sans filtre. Très vite, cette pratique si simple et accessible m’a apporté une joie douce au quotidien, une grande sensorialité, puis une qualité de présence qui ne me quitte plus.
La joie de l’action et l’obéissance à l’élan de vie
Une autre source de joie est l’élan de vie qui émerge et désire s’expérimenter dans la matière. Quand nous libérons cet élan, nous libérons la spontanéité et la joie. Cet élan provient directement de la source de toute vie, c’est l’expression de notre essence même. Il a le plus beau rôle dans notre fonctionnement quotidien : proposer l’action la plus juste dans l’instant. Nous pouvons le ressentir à travers un élan, un mouvement spontané, un désir vers une activité. Cette spontanéité est comme une bulle de joie qui émerge : elle ne peut exploser que si nous consentons à lui obéir. Suivre ses élans, sans but ni stratégie, nous ramène pas à pas vers notre liberté intrinsèque et la source même du vivant.
Au quotidien, je suis attentive à écouter où l’élan me mène. J’observe que si je commence par les actions qui me plaisent le moins dans l’espoir de faire ce qui me plait ensuite, je n’ai pas le temps de faire les secondes, les premières remplissants ma journée. Par contre, si j’écoute l’élan, même déconcertant au niveau des priorités habituelles, non seulement je suis comblée, mais en plus les actions moins plaisantes sont faites ensuite en peu de temps et avec légèreté. J’ai aussi fait des choix radicaux de vie. La joie demande parfois du courage.
Retrouver la joie d’être simplement soi
Mais pour retrouver totalement la joie de l’enfant, l’invitation ici est de s’autoriser profondément à être soi. Etre soi, c’est être ce qu’on est capable d’être à un instant donné. C’est le simple vécu direct et sans restriction de ce que nous sommes à chaque instant, avec notre personnalité, notre corps, nos limites, émotions, sensations, aptitudes, croyances, erreurs, jugements, refus et réussites.
C’est donc un élan et un geste d’amour immense pour nous-même : c’est une autorisation sans précédent à être pleinement à chaque seconde ce que la vie fait de nous, notre vécu de l’instant et ce que la vie nous propose. Peu à peu nous pouvons ouvrir notre coeur à ce qui se présente en nous et à nous en contactant notre intériorité et en nous laissant toucher totalement par nous-même. Tout en nous mérite notre amour, et nous sommes les seuls à pouvoir nous le donner. C’est dans ce contact profond avec soi qu’émerge l’amour inconditionnel de ce que nous sommes. Alors, la joie du petit enfant, enfin aimé profondément, se réveille et explose en myriades d’étoiles.
Notre être entier est ainsi de plus en plus comblé, non pas parce que nous obtenons ce que nous voulons, mais parce que nous consentons à vivre l’instant à partir de notre essence. Et dans ce mystère vivant que nous sommes, nous consentons totalement à ce que la joie émerge… ou pas. Car cet accord profond est une autorisation à être tout.